Préambules anatomiques
● L’arcade du fléchisseur commun superficiel :
La myologie de l’avant-bras est complexe car de nombreux muscles en constituent sa structure musculaire. L’avant-bras est constitué de trois loges musculaires : une loge musculaire latérale, une loge musculaire postérieure et une loge musculaire antérieure. Ces loges sont elles mêmes constituées de différents plans musculaires, superficiels et profonds. Les limites des loges musculaires de l’avant-bras sont formés par des septums inter-musculaires (antéro-latéral et postéro-latéral), qui sont des cloisons fibreuses (structures inextensibles) tendues entre de l’os et le fascia superficiel de l’avant-bras.
Le muscle fléchisseur commun superficiel est un muscle appartenant au plan superficiel de la loge antérieure de l’avant-bras. Il s’insère sur plusieurs structures au niveau de l’avant-bras :
- par le tendon commun des fléchisseurs sur l’épicondyle médial de l’humérus
- sur le faisceau moyen du ligament collatéral ulnaire
- sur la face antéro-inférieure de l’apophyse coronoïde de l’ulna
- sur le versant inférieur de la moitié supérieure du bord antérieur du radius
Entre l’insertion coronoïdienne de l’ulna et l’insertion sur le radius, le fléchisseur superficiel décrit une arcade tendineuse (cf image ci-dessous) en dessous de laquelle passe le nerf médian et l’artère ulnaire.

Le muscle fléchisseur commun superficiel se termine par quatre tendons à la face palmaire du corps des doigts II à V. Il est innervé par le nerf médian et permet la flexion de l’articulation inter-phalangienne proximale mais aussi accessoirement celle du poignet.
● Anatomie du nerf médian :
Le nerf médian est un nerf du membre supérieur, mixte, c’est à dire ayant un rôle sensitif et moteur.
‣ Origine :
Il né du rachis cervical, étant formé par la réunion de la branche médiale du faisceau antéro-latéral et de la branche latérale du faisceau antéro-médial du plexus brachial, au niveau de la région axillaire, en avant de l’artère axillaire. Les racines nerveuses rachidiennes dont dépend le nerf médian sont C5, C6, C7, C8 et T1 au niveau cervical.
‣ Trajet :
Dans la fosse axillaire, il se dirige en bas et en dehors en accompagnant l’artère axillaire. Il devient ensuite vertical et accompagne l’artère brachiale dans le canal brachial avant de déboucher dans la gouttière bicipitale médiale. Puis il devient oblique en bas et en dehors, passe derrière le Lacertus Fibrosus, devient vertical en passant successivement entre les deux chefs du rond pronateur sous l’arcade du fléchisseur commun superficiel, pour cheminer dans l’avant-bras entre le muscle fléchisseur commun superficiel et le muscle fléchisseur commun profond, donc entre les plans superficiel et profond de la loge antérieure de l’avant-bras. Il passe enfin dans le canal carpien en avant du tendon fléchisseur commun superficiel destiné au doigt II. Au cours de son trajet, le nerf médian distribue de nombreuses branches collatérales.
‣ Terminaison :
A la sortie du canal carpien, le nerf médian se divise en nerfs thénariens, en nerfs digitaux palmaires communs et en nerfs digitaux palmaires propres.
‣ Rôle moteur :
Le nerf médian est moteur pour les muscles de la loge antérieure de l’avant-bras (sauf le fléchisseur ulnaire du carpe et les deux chefs médiaux du fléchisseur commun profond), pour les muscles de la loge thénar (sauf l’adducteur du I et le chef profond du court fléchisseur du I), et pour les deux premiers muscles lombricaux. La fonction motrice du nerf médian est donc de contrôler la flexion de la main, l’opposition du pouce (notamment la pince pouce / index) et la pronation de l’avant-bras (mouvement qui permet d’amener la paume de la main vers le sol).
‣ Rôle sensitif :
Le nerf médian est sensitif pour une partie de la main :
- à la face palmaire : il gère la sensibilité de toute la peau latéralement à l’axe du IV, sauf la base de la loge thénar
- à la face dorsale de la main : il innerve les 2 ème et 3 ème phalanges des doigts II et III, et la moitié latérale du doigt IV

Qu’est ce que le syndrome de l’arcade du fléchisseur commun superficiel ?
Le syndrome de l’arcade du fléchisseur commun superficiel (aussi appelé « syndrome de l’arcade des fléchisseurs ») se caractérise par la compression dynamique du nerf médian sous l’arcade du fléchisseur commun superficiel.
Cette compression du nerf médian est dite « dynamique » car elle dépend de la sollicitation du muscle fléchisseur commun superficiel lors de certains mouvements spécifiques répétitifs et disparaît en dehors de ce contexte d’effort. C’est ce qui différencie le syndrome de l’arcade des fléchisseurs d’autres compressions neurologiques dites « statiques », comme le syndrome du canal carpien, pour lequel le point compressif du nerf médian entre, cette fois-ci, un ligament (structure inextensible) et certains os du carpe ne dépend pas uniquement de la réalisation de certains mouvements spécifiques et répétés. C’est par exemple pour cette raison que les symptômes du syndrome de l’arcade des fléchisseurs ne réveillent pas les patients la nuit, contrairement au syndrome du canal carpien, ce qui en fait d’ailleurs l’une de ses caractéristiques.
Le syndrome de l’arcade des fléchisseurs est une pathologie courante, mais probablement sous-diagnostiquée car relativement méconnue. Il touche autant les hommes que les femmes, en général après 35 ans.
Étiologies
Puisqu’il s’agit d’un syndrome de compression neurologique dynamique, il est important de comprendre qu’aucune cause de compression « statique » n’est retrouvée dans le syndrome de l’arcade du fléchisseur commun superficiel. Différents facteurs de risque pourraient être à l’origine des symptômes décrits :
- la répétition de gestes de préhension de la main ou de flexion du poignet, notamment chez les travailleurs effectuant des tâches manuelles répétitives de précision, chez certains musiciens et chez certains sportifs (tennisman, golfeurs, etc …)
- une hypertrophie musculaire de l’avant-bras, favorisant la compression dynamique du nerf médian sous l’arcade du fléchisseur commun superficiel, fréquentes chez certains sportifs
- un antécédent de traumatisme de l’avant-bras
- les personnes atteintes d’un syndrome du canal carpien, qui ont une probabilité plus grande de développer un syndrome de l’arcade des fléchisseurs (cette double atteinte nerveuse est appelée « double crush syndrome »)
Les signes cliniques du syndrome de l’arcade du fléchisseur commun superficiel
Les symptômes du syndrome de l’arcade des fléchisseurs peuvent ressembler fortement à ceux du syndrome du canal carpien. C’est d’ailleurs ce qui explique que son diagnostic est souvent tardif. Tous les symptômes du syndrome de l’arcade du fléchisseur commun superficiel sont inconstants, intermittents, majoritairement unilatéraux et présents uniquement la journée. Nous retrouvons :
- des douleurs mal localisées au niveau de la face antérieure du coude et de l’avant-bras, pouvant parfois diffuser jusque dans l’épaule
- une sensation de lourdeur et de crampes dans l’ensemble de l’avant-bras et de la main
- des paresthésies à type de fourmillements, engourdissements, picotements au niveau des doigts longs (surtout dans l’index et le majeur mais aussi dans l’annulaire, sans que soit concerné le pouce, sauf si le syndrome de l’arcade des fléchisseurs est associé à un syndrome du canal carpien), mais pouvant aussi se localiser au niveau de la paume de main, du poignet et de la face antérieure de l’avant-bras
- une fatigabilité musculaire appelée « parésie » notamment dans la flexion des doigts longs (surtout du majeur), la pince pouce / index mais aussi plus accessoirement de la flexion du poignet et à la pronation de l’avant-bras : tendance à « lâcher » les objets, difficulté à ouvrir un bocal ou une bouteille, perte de dextérité de la main, etc …
- la persistance de symptômes après une chirurgie du syndrome du canal carpien
Diagnostic
Puisque le syndrome de l’arcade du fléchisseur superficiel est la compression dynamique du nerf médian au niveau de l’avant-bras, son diagnostic repose uniquement sur la clinique. En effet, l’électromyogramme qui est l’examen de référence pour détecter une éventuelle souffrance d’un nerf ne permet pas de mettre en évidence la compression dynamique du nerf médian sous l’arcade du fléchisseur commun superficiel.
Son diagnostic repose sur ce qu’on appelle la « Triade de Hagert » :
- une douleur ou « point gâchette » au point de compression du nerf médian sous l’arcade du fléchisseur commun superficiel
- une perte de force spécifique du long fléchisseur du I, du long fléchisseur du II (pince pouce / index), du fléchisseur radial du carpe et lors de la pronation du poignet
- un « Scratch Collapse Sign » mettant en évidence une irritation nerveuse du nerf médian sous l’arcade du fléchisseur commun superficiel
Traitements
Une prise en charge adaptée est essentielle et varie selon la sévérité et l’impact des symptômes du syndrome de l’arcade du fléchisseur commun superficiel dans la vie quotidienne.
- le traitement est d’abord dit « conservateur » dans les formes précoces et paucisymptomatiques :
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- prévention : mise en place de stratégies d’évitement ou de compensation des gestes favorisants les symptômes, adaptation de l’activité physique voire arrêt du sport quand cela est envisageable, K-Tape, etc …
- mesures non pharmacologiques : port transitoire d’une attelle de fonction pour limiter la réalisation des mouvements douloureux, rééducation en kinésithérapie (massage, étirements musculaires adaptés, etc …), prise en charge en ostéopathie …
- les traitements médicamenteux : il consistent en la prescription d’antalgiques et / ou anti-inflammatoires, par voie orale ou parfois par infiltrations
- l’intervention chirurgicale : elle est proposée dans les formes plus évoluées, lorsque la douleur est réfractaire aux traitements conservateur et médicamenteux. Cette chirurgie se fait en ambulatoire et permet une récupération immédiate de la force de la main une fois le nerf médian libéré sous l’arcade du fléchisseur commun superficiel
La prise en charge du syndrome de l’arcade du fléchisseur commun superficiel en ostéopathie
L’ostéopathie peut accompagner un patient souffrant d’un syndrome de l’arcade du fléchisseur commun superficiel dans la réalisation de son traitement conservateur.
L’objectif d’une prise en charge en ostéopathie est de traiter les éventuelles dysfonctions somatiques (altération de la mobilité, de la viscoélasticité ou de la texture des composantes du système somatique) diagnostiquées plus ou moins à distance du nerf médian irrité sous le fléchisseur commun superficiel et pouvant participer à l’entretien de la symptomatologie du patient, pour permettre ainsi de potentialiser les effets du traitement dit « conservateur ».
L’ostéopathe peut par exemple être amené à traiter une restriction de mobilité d’une articulation propre du coude, mais aussi plus à distance de l’épaule et du poignet, un trouble de tonicité neuro-musculaire de l’environnement tissulaire du nerf médian à proximité du fléchisseur commun superficiel, une perte d’élasticité fascia de l’avant-bras, etc …
L’ostéopathe mettra en place les techniques les plus adaptées, les plus confortables et surtout les plus efficaces pour prendre en charge au mieux son patient. Elles peuvent être de différents types selon l’objectif du praticien. Il peut choisir de concentrer son action sur la mobilité ostéo-articulaire grâce à des techniques manipulatives ou des techniques de mobilisation passive. Il peut aussi choisir de spécifier son action sur des troubles de tonicité musculaire grâce à des techniques de ponçage, myotensives ou bien encore d’étirements spécifiques. Il peut également choisir d’agir sur l’élasticité aponévrotique grâce à des techniques plus spécifiques à visée fascia, etc … Enfin, il peut pratiquer des techniques à visée « neurodynamique », particulièrement adaptées dans le cas de la prise en charge d’un syndrome de l’arcade des fléchisseurs superficiels, permettant ainsi de mobiliser le tissu nerveux et plus précisément le nerf médian atteint.
En bref, l’ostéopathe dispose d’un panel de techniques qu’il inclus dans un traitement holistique afin de permettre la meilleure prise en charge possible pour son patient !
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