Cet article a pour but d’exposer les résultats surprenants et contre-intuitifs d’IRM réalisés sur des adultes dont les genoux étaient complètement non douloureux.

Introduction

La douleur de genou, ou gonalgie, est un symptôme très courant, pouvant survenir brutalement ou progressivement, avec ou sans notion de traumatisme associé. Les gonalgies sont des motifs de consultation très fréquents en consultation.

Si des études ont montré que les plaintes concernant les genoux sont plus fréquentes avec l’âge, nous savons aujourd’hui que la présence de symptômes douloureux n’est pas forcémment associée à une atteinte structurelle du genou

Ainsi, la réalisation de certains bilans d’imagerie en cas de gonalgie devient de moins en moins systématique. Par exemple, une étude restrospective a montré que sur un échantillon de 123 bilans d’IRM réalisés au sein de la clinique de l’Europe à Rouen concernant une prise en charge de gonalgie, 63,41 % des prescriptions étaient considérés comme inapropriées.

Voici pour preuve une étude récemment publié dont l’objectif a été d’évaluer la prévalence de lésions structurelles à l’IRM de genoux d’individus dont les genoux sont non douloureux

L’étude

Il s’agit d’une étude de cohorte prospective (étude statistique dans laquelle la date de suivi débute à la date de mise en place de l’enquête) publiée en 2020 dans la revue « Skeletal Radiology » qui a recruté 115 personnes volontaires (51 hommes, 64 femmes; âge médian : 44 ans) se plaignant d’aucune douleur et ne présentant aucun antécédents médicaux des genoux

D’autre part, pour ne pas rajouter un biais de représentativité, tous les participants de l’étude ne satisfaisaient pas aux recommandations de santé physiques actuelles, à savoir 30 minutes d’activité physique d’intensité moyenne, cinq jours par semaine ou 20 minutes d’activité physique plus intense, trois jours par semaine

Les 230 genoux non douloureux ont été bilantés par IRM et analysés par un radiologue expérimenté ayant dix ans d’expérience et étudiant les ménisques, le cartilage articulaire, la moelle osseuse, les tendons et les ligaments

Résultats

Les résultats peuvent paraître surprenants puisque 97 % des participants de l’étude présentent des anomalies d’au moins une structure du genou à l’IRM, de différents degrés de gravité. Ces résultats comprennent des déchirures méniscales, des anomalies du cartilage, un œdème de la moelle osseuse et des anomalies tendineuses et ligamentaires.

-> Les anomalies méniscales : 30 % des participants ont des déchirures méniscales et 18 % d’entres eux ont une dégénérescence méniscale visible à l’IRM

-> Les anomalies du cartilage articulaire : elles sont constatées dans 62 % des genoux scannés, surtout dans le compartiment fémoro-patellaire

  • 20 % des genoux ont des lésions cartilagineuses de grade 1
  • 19 % des genoux ont des lésions de cartilage de grade 2
  • 19 % des genoux ont des lésions de grade 3 (atteinte modérée)
  • 31 % des genoux ont des lésions de grade 4 (atteinte sévère)

-> Les oedème de moelle osseuse : des lésions de type œdème médullaire ont été retrouvées dans 52 % des genoux scannés, surtout dans le compartiment fémoro-patellaire (43 % des genoux)

  • 18 % des genoux n’ont que des lésions mineures de moelle osseuse
  • 25 % des genoux ont des lésions de moelle osseuse de grade 2 (atteinte modérée)
  • 7 % des genoux ont des lésions de grade 3 (atteinte sévère) 

-> Les anomalies tendineuses : elles concernent 46 % des genoux et les atteintes touchent majoritairement le tendon rotulien dans 27 % des cas, suivi du tendon quadriccipital dans 13 % des cas

  • 22 % des genoux n’ont que des lésions tendineuses de grade 1
  • 21 % des genoux ont des lésions tendineuses de grade 2 (lésion modérée)
  • 6 % des genoux ont des lésions tendineuses de grade 3 (tendinite sévère)

-> Les anomalies ligamentaires : elles concernent 38 % des genoux scannés et touchent surtout le ligament croisé antérieur dans 34 % des cas

  • 35 % des genoux n’ont que des lésions bénignes (grade 1, ligament simplement épaissi)
  • 3 % des genoux présentent une rupture partielle ligamentaire 

D’autres anomalies ont été constatées, comme : 

  • un épanchement articulaire, dans 3 % des genoux scannés
  • un kyste de Baker (kyste poplité) dans 33 % des genoux scannés et d’autres types de kyste retrouvés dans  20 % des genoux scannés
  • une bursite pé-patellaire dans 26 % des genoux scannés
  •  une synovite de Hoffa dans 23 % des genoux scannés

D’autre part, les résultats de l’étude montrent que les participants présentant des anomalies du cartilage sont huit fois plus susceptibles de présenter un oedème de moelle osseuse

L’étude révèle également qu’il n’y a acune différence dans la prévalence des anomalies de genoux entre les hommes et les femmes.

Enfin, la prévalence des lésions augmente généralement avec l’âge

Conclusion

Les résultats d’IRM de genoux non douloureux ont montré des lésions anatomiques dans la plupart des cas. Ils mettent en exergue qu’une souffrance du genou ne vient pas forcément d’une lésion de sa structure

D’autres études ont montré que certaines interventions chirurgicales n’ont pas plus d’efficacité qu’une intervention chirurgicale fictive et les résultats exposés précédemment peuvent constituer une explication plausible à cela. Traiter une prétendue « lésion anatomique » ne signifie pas toujours que la cause de la douleur est prise en charge efficacement.

La science nous montre en revanche que pour diminuer la douleur de manière efficace et durable, il est absolument nécessaire et primordial de pratiquer une activité physique régulière et de mobiliser les genoux au quotidien

Cela peut paraître contre-intuitif pour beaucoup lorsqu’on souffre, pourtant l’activité physique a des vertus indéniables pour prendre en charge la douleur !

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