Le syndrome de l’arcade de Fröhse donne des symptômes pour lesquels les patients consultent souvent en ostéopathie. Il s’agit d’une pathologie fréquente, pourtant souvent méconnue. Voici dans cet article tout ce qu’il y a à savoir à son sujet !
Préambules anatomiques : le nerf radial
Le nerf radial est un nerf du membre supérieur, mixte, c’est à dire ayant un rôle sensitif et moteur.
‣ Origine :
Il né du rachis cervical, étant formé par le faisceau postérieur du plexus brachial au niveau de la région axillaire, après que celui-ci ai donné le nerf axillaire, en arrière de l’artère axillaire. Le nerf radial est la plus grosse branche terminale du plexus brachial. Les racines nerveuses rachidiennes dont dépend le nerf radial sont C5, C6, C7, C8 et T1 au niveau cervical.
‣ Trajet :
Dans la fosse axillaire, il se dirige en bas, en dehors et en arrière en accompagnant l’artère axillaire en arrière de celle-ci. Il devient ensuite oblique en bas et en dehors en passant en avant des muscles grand rond et grand dorsal. Puis, il traverse l’espace axillaire inférieur et s’engage dans le sillon du nerf radial de l’humérus, avec l’artère brachiale profonde. Il perfore ensuite le septum inter-musculaire latéral, entre le muscle triceps et le muscle brachial, au dessus de l’épicondyle latérale avant de se retrouver dans la gouttière bicipitale latérale jusqu’au coude.
Au cours de son trajet, le nerf radial distribue de nombreuses branches collatérales : pour l’humérus, pour le coude, pour l’artère radiale profonde, pour le triceps, pour le muscle anconé et pour les muscles de la loge latérale de l’avant-bras : le muscle brachio-radial, le muscle long extenseur radial du carpe, le muscle court extenseur radial du carpe et le muscle supinateur.
‣ Terminaison :
Au niveau du coude, le nerf radial se divise en deux branches terminales :
- une branche antérieure qui est le rameau superficiel du nerf radial ayant un rôle uniquement sensitif. Elle chemine en avant du chef superficiel du muscle supinateur et est recouverte en dehors par le muscle brachio-radial. Au niveau du 1/3 inférieur de l’avant-bras, la branche antérieure du nerf radial contourne le radius pour passer en arrière. C’est à ce niveau qu’elle perfore le fascia superficiel, entre le muscle brachio-radial et le muscle long extenseur radial du carpe, pour donner ensuite un rameau innervant l’éminence thénar et les nerfs digitaux dorsaux pour l’innervation sensitive d’une partie de la face dorsale des doigts
- une branche postérieure qui est le rameau profond du nerf radial, ayant un rôle uniquement moteur. Cette branche chemine avec l’artère interosseuse postérieure, contourne le col du radius et rejoint immédiatement la loge postérieure de l’avant-bras. Elle passe entre les deux chefs du muscle supinateur sous un épaississement tendineux, membraneux ou musculaire appelé arcade de Fröhse. Au bord inférieur du muscle supinateur, la branche postérieure du nerf radial se divise en trois branches terminales :
-
- une branche postérieure pour l’innervation des muscles de la couche superficielle de la loge postérieure de l’avant-bras (l’extenseur commun des doigts, l’extenseur du V et l’extenseur ulnaire du carpe)
- une branche antérieure cheminant sur la membrane interosseuse et qui innerve les muscles de la couche profonde de la loge postérieure de l’avant-bras (l’extenseur propre du II, les long et court extenseurs du pouce et le long abducteur du pouce)
- le nerf interosseux antébrachial postérieur, qui descend en arrière de la membrane interosseuse de l’avant-bras et s’engage dans la gaine ostéo-fibreuse du muscle extenseur commun des doigts pour se ramifier sur la face dorsale des articulations du poignet et des doigts
‣ Rôle moteur :
Le nerf radial est le nerf de l’extension et de la supination de l’avant-bras (ramener la paume de main vers le ciel).
Le nerf radial est moteur pour les muscles de la loge postérieure du bras et de l’avant-bras et pour les muscles de la loge latérale de l’avant-bras. En somme, le muscle radial innerve : les trois chefs du muscle triceps, le muscle anconé, le muscle supinateur, le muscle brachio-radial, le muscle long extenseur radial du carpe, le muscle court extenseur radial du carpe, le muscle long abducteur du pouce, le muscle long extenseur du pouce, le muscle court extenseur du pouce, les muscles extenseurs de l’index et du petit doigt, le muscle extenseur commun des doigts et le muscle extenseur ulnaire du carpe.
A noter que le nerf radial n’a pas d’action sur les muscles intrinsèques de la main.
‣ Rôle sensitif :
Le nerf radial est sensitif pour :
- la face postérieure du bras
- la face postéro-latérale de la partie inférieure du bras
- la face postérieure du coude
- la partie médiane de la face postérieure de l’avant-bras
- la base de l’éminence thénar au niveau de la tabatière anatomique
- la face dorsale de la main pour tout ce qui est en dehors de la moitié externe du IV, sauf la 2 ème et 3 ème phalange du II et du III et la phalange distale du pouce

Qu’est-ce que le syndrome de l’arcade de Fröhse ?
Le syndrome de l’arcade de Fröhse, est un syndrome canalaire se caractérisant par la compression dynamique de la branche terminale profonde du nerf radial (branche terminale motrice uniquement), sous l’arcade de Fröhse lors de son passage sous le muscle supinateur à l’avant-bras.
Cette compression de la branche profonde du nerf radial sous l’arcade de Fröhse est dite « dynamique » car elle dépend de la réalisation de mouvements répétés de prono-supination et d’extension du coude, du poignet et des doigts surtout quand l’avant-bras est en supination. C’est ce qui différencie le syndrome de l’arcade de Fröhse d’autres compressions neurologiques dites « statiques », comme le syndrome du canal carpien, pour lequel le point compressif du nerf médian entre un ligament (structure inextensible) et certains os du carpe ne dépend pas uniquement de la réalisation de certains mouvements spécifiques donnés. C’est par exemple pour cette raison que les symptômes de l’arcade de Fröhse ne réveillent pas les patients la nuit, contrairement aux phénomènes compressifs dits « statiques », ce qui en fait d’ailleurs l’une de ses caractéristiques.
Le syndrome de l’arcade de Fröhse n’est pas une pathologie rare mais elle est probablement sous-diagnostiquée car encore relativement méconnue. Elle touche préférentiellement les hommes plus que les femmes, en général sur leur membre supérieur dominant et après 35 ans.
Étiologies
Différents facteurs de risque peuvent être à l’origine de la compression dynamique du nerf radial sous l’arcade de Fröhse :
- un aspect tendineux et hypertrophique de l’arcade de Fröhse, prédisposant au développement d’un phénomène compressif pour la branche profonde du nerf radial
- la répétition de gestes de prono-supination ou la répétition de mouvements répétés d’extension du coude, du poignet et des doigts notamment chez certains travailleurs (travailleurs manuels qui vissent / dévissent beaucoup, les secrétaires, les pâtissiers, les maroquiniers, les peintres en bâtiment, les ébénistes, les femmes de ménage, etc …), chez certains sportifs (tennisman, cyclistes / motards, lanceurs, etc …) et chez certains musiciens (pianistes, flûtistes, violonistes, etc …)
- une inflammation chronique des muscles épicondyliens signant une épicondylite peut favoriser l’apparition d’un syndrome de l’arcade de Fröhse
- une hypertrophie musculaire de l’avant-bras, favorisant la compression dynamique du nerf radial sous l’arcade de Fröhse, notamment chez certains sportifs
- un antécédent de traumatisme ou des micro-traumatismes répétés au niveau du coude / de l’avant-bras
Les signes cliniques du syndrome de l’arcade de Fröhse
Plusieurs symptômes sont présents dans le syndrome de l’arcade de Fröhse, apparaissant le plus souvent de manière progressive :
- une douleur postéro-latérale du coude mimant volontiers celle d’une épicondylite, et pouvant parfois diffuser aussi sur la face postéro-latérale de l’avant-bras
- une douleur sur la face postérieure du poignet (comme un bracelet trop serré)
- une fatigabilité musculaire appelée « parésie » des muscles innervés par la branche profonde du nerf radial, donc à l’extension du poignet et des doigts (extenseur commun des doigts, extenseur ulnaire du carpe, extenseur du V, extenseur propre du II), du pouce (court extenseur du pouce, long extenseur du pouce et long abducteur du pouce) et lors de l’inclinaison ulnaire du poignet (extenseur ulnaire du carpe) : ouverture de la main, porter un sac de course, etc …
A noter que le syndrome de l’arcade de Fröhse se caractérisant par la compression de la branche motrice du nerf radial, on ne retrouve pas d’atteinte de la sensibilité nerveuse dans le territoire du nerf radial.
Diagnostic
Puisque le syndrome de l’arcade de Fröhse est la compression dynamique du nerf radial sous le coude, son diagnostic repose uniquement sur la clinique. En effet, l’électromyogramme, qui est l’examen de référence pour détecter une éventuelle souffrance d’un nerf, ne permet souvent pas de mettre en évidence la compression dynamique du nerf radial sous l’arcade de Fröhse.
Son diagnostic repose sur ce qu’on appelle la « Triade de Hagert » :
- une douleur ou « point gâchette » au point de compression du nerf radial sous l’arcade de Fröhse, situé entre 3 et 5 cm sous l’épicondyle, entre le muscle brachio-radial et le long extenseur radial du carpe
- une perte de force à l’extension du poignet, du pouce et des doigts (sans toutefois que le court et le long extenseurs radial du carpe ne soient atteints)
- un « Scratch Collapse Sign » mettant en évidence une irritation nerveuse de la branche motrice du nerf radial sous l’arcade de Fröhse
Traitements
Une prise en charge adaptée est essentielle et varie selon la sévérité et l’impact des symptômes du syndrome de l’arcade de Fröhse dans la vie quotidienne.
- le traitement est d’abord dit « conservateur » dans les formes précoces et paucisymptomatiques :
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- prévention : mise en place de stratégies d’évitement ou de compensation des gestes favorisants les symptômes (notamment mouvement de prono-supination en force ou répété et extension du coude, du poignet et des doigts), adaptation de l’activité physique voire arrêt du sport quelques semaines, K-Tape, etc …
- mesures non pharmacologiques : port transitoire d’une attelle de fonction pour limiter la réalisation des mouvements douloureux, rééducation en kinésithérapie (massage, étirements musculaires adaptés, correction du geste technique favorisant la compression, etc …), prise en charge en ostéopathie …
- prévention : mise en place de stratégies d’évitement ou de compensation des gestes favorisants les symptômes (notamment mouvement de prono-supination en force ou répété et extension du coude, du poignet et des doigts), adaptation de l’activité physique voire arrêt du sport quelques semaines, K-Tape, etc …
- les traitements médicamenteux : il consistent en la prescription d’antalgiques et / ou anti-inflammatoires, par voie orale ou parfois par infiltrations, de myorelaxants
- l’intervention chirurgicale : elle est proposée dans les formes plus évoluées, lorsque la douleur est réfractaire aux traitements conservateur et médicamenteux. Cette chirurgie se fait en ambulatoire et permet une récupération immédiate de la force du coude, du poignet et des doigts à l’extension, une fois la branche postérieure du nerf radial libérée sous l’arcade de Fröhse
La prise en charge du syndrome de l’arcade de Fröhse en ostéopathie
L’ostéopathie peut accompagner un patient souffrant d’un syndrome de l’arcade de Fröhse dans la réalisation de son traitement conservateur.
L’objectif d’une prise en charge en ostéopathie est de traiter les éventuelles dysfonctions somatiques (altération de la mobilité, de la viscoélasticité ou de la texture des composantes du système somatique) diagnostiquées plus ou moins à distance de la branche profonde du nerf radial irrité sous le muscle supinateur et pouvant participer à l’entretien de la symptomatologie du patient, pour permettre ainsi de potentialiser les effets du traitement dit « conservateur ».
L’ostéopathe peut par exemple être amené à traiter une restriction de mobilité d’une articulation propre du coude, mais aussi plus à distance du poignet et de l’épaule, un trouble de tonicité de l’environnement musculaire du nerf radial sur son trajet, une perte d’élasticité fascia de l’avant-bras, etc …
L’ostéopathe mettra en place les techniques les plus adaptées, les plus confortables et surtout les plus efficaces pour prendre en charge au mieux son patient. Elles peuvent être de différents types selon l’objectif du praticien. Il peut choisir de concentrer son action sur la mobilité ostéo-articulaire grâce à des techniques manipulatives ou des techniques de mobilisation passive. Il peut aussi choisir de spécifier son action sur des troubles de tonicité musculaire grâce à des techniques de ponçage, myotensives ou bien encore d’étirements spécifiques. Il peut également choisir d’agir sur l’élasticité aponévrotique grâce à des techniques plus spécifiques à visée fascia, etc … Enfin, il peut pratiquer des techniques à visée « neurodynamique », particulièrement adaptées dans le cas de la prise en charge d’un syndrome de l’arcade de Fröhse, permettant ainsi de mobiliser le nerf radial afin de stimuler son glissement dans son environnement tissulaire et de stimuler sa vascularisation intraneurale.
En bref, l’ostéopathe dispose d’un panel de techniques qu’il inclus dans un traitement holistique afin de permettre la meilleure prise en charge possible pour son patient !
Si vous avez une question sur cet article « Ostéopathie et syndrome de l’arcade de Fröhse », n’hésitez pas à me contacter !