
Contexte
Le syndrome de compression du nerf cutané antérieur est responsable d’une douleur abdominale mal connue et souvent sous-diagnostiquée. Pourtant, selon les dernières publications sur le sujet, un quart des douleurs abdominales chroniques seraient dues à une pathologie de la paroi abdominale et majoritairement à une compression du nerf cutané antérieur.
Une étude hollandaise parue en 2015 a même conclu qu’environ 2 % des patients se présentant aux urgences pour des douleurs abdominales aiguës souffriraient d’un syndrome de compression du nerf cutané antérieur, soit une incidence de 1/1800 nouveaux cas par an dans la population en générale.
Le nerf cutané antérieur
La paroi abdominale est innervée par les racines nerveuses comprises entre la 7 ème vertèbre dorsale et la 12 ème vertèbre dorsale (T7 à T12), dont sont issus les nerfs intercostaux, souvent connus dans leur atteinte constituant la fameuse « névralgie intercostale ». Ces nerfs intercostaux longent les côtes et se ramifient en branches antérieure, latérale et postérieure.
La branche antérieure du nerf intercostal cède un rameau cutané, traversant la gaine des muscles grands droits, de chaque côté de la ligne médiane de l’abdomen (ligne blanche ou ligne semi-lunaire) pour se ramifier en superficie de l’aponévrose (cf images ci-dessous).


Au travers des muscles grands-droits, le rameau cutané antérieur décrit un double angle droit, siège de conflit lorsqu’une contrainte mécanique vient s’exercer sur cette zone : après augmentation de la pression intra-abdominale comme dans l’obésité ou pendant la grossesse, suite à la formation d’une cicatrice, suite à un traumatisme, suite à la prise de contraception orale, probablement en lien avec de l’oedème tissulaire, etc … C’est alors à ce moment là qu’apparaît le syndrome de compression du nerf cutané antérieur !
Les signes cliniques de la compression du nerf cutané antérieur
Le patient situe en générale une douleur très localisée en coup de poignard (à la différence d’une douleur d’origine viscérale, souvent diffuse et sourde), unilatérale, continue ou intermittente et d’intensité en général modérée à forte.
La douleur est favorisée par la respiration, le rire, la toux, par des éternuements, ou par le port de vêtements serrés. De même, l’effort augmente l’algie par contraction des muscles de la gaine abdominale sur le lieu de compression nerveuse, soulagée instantanément par une position de repos ou le maintien de la paroi abdominale par les mains du patient.
Examen clinique
Lors de l’examen clinique du patient, plusieurs indices permettent de poser le diagnostic de syndrome de compression du nerf cutané antérieur :
- d’abord à l’observation, le patient se présente souvent penché en avant pour diminuer la tension sur la musculature abdominale, les mains soutenant son ventre
- une manoeuvre de Vasalva positive : la douleur est reproduite localement et en coup de poignard lors de la toux, d’un rire, d’un éternuement, etc …
- un fingertip net : le patient parvient à poser son doigt précisément sur le point douloureux
- un test du palpé-roulé positif : lorsqu’un examinateur pince et fait rouler la peau entre son pouce et son index sur la localisation de la douleur, la zone devient algique et le patient signale immédiatement la reproduction exacte de sa douleur, contrairement à la zone controlatérale ne reproduisant aucune gêne
- un test de Carnett positif : allongé sur le dos, l’examinateur demande au patient de lever la tête, ce qui contracte les muscles abdominaux et reproduit la douleur en cas de compression du nerf cutané antérieur
- on ne décèle aucun signe d’alarme pouvant laisser suggérer une atteinte viscérale sous-jacente
Traitement médical
Le traitement médical repose sur la prise en charge de la douleur, par des infiltrations d’anesthésiques et / ou de corticostéroïdes, pouvant être à répéter dans le temps, selon la Revue Médicale Suisse.
Parfois, le traitement peut aussi nécessiter en plus une neurolyse chimique et plus rarement encore, une libération chirurgicale.
Et l’ostéopathie ?
Au vu de la physiopathologie du syndrome de compression du nerf cutané antérieur, l’ostéopathie peut sembler être une approche bénéfique dans sa prise en charge.
Une fois écartée toute cause dont le traitement ne rentrerai par dans son champ de compétence, l’ostéopathe effectue un bilan du corps afin d’établir son plan de traitement.
Dans sa prise en charge, l’ostéopathe s’intéresse de près aux structures anatomiques en lien avec cette douleur, pour diminuer les contraintes pouvant s’appliquer sur le nerf cutané antérieur. Cela peut être les muscles grands droits et leurs insertions sur le bassin et les côtes, la zone dorsale de T7 à T12, l’élasticité de l’aponévrose abdominale au niveau de l’émergence nerveuse concernée (comme dans le cas d’une cicatrice, par exemple), etc …
Son but est alors de lever les réactions de défense du corps, qui auront entraîné une hypomobilité articulaire pelvienne, costale ou bien encore dorsale, une hypertonicité musculaire de la gaine abdominale, une perte d’élasticité des fascias et aponévroses abdominaux, en mettant en place les techniques les plus adaptées, les plus confortables et surtout les plus efficaces pour soulager le patient.
Parfois, plusieurs consultations peuvent être nécessaires selon l’histoire de la douleur et son éventuelle chronicité.
Conclusion
L’origine d’une douleur abdominale serait donc plus fréquente qu’on le ne croit liée à un syndrome de compression du nerf cutané antérieur.
Grâce à une anamnèse précise, un examen clinique ciblé et un bilan médical approprié, le diagnostic posé permet facilement une prise en charge pluri-disciplinaire dans laquelle l’ostéopathie trouve tout à fait sa place.
Pour plus d’informations en lien avec cet article « Le syndrome de compression du nerf cutané antérieur, un syndrome méconnu mais par si rare ! », n’hésitez pas à me contacter !